Jaga Jankowska Cappigny














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by Jaga Jankowska Cappigny
































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« Jaga Jankowska Cappigny, devenir artiste »
par Léa Djurado


Jaga Jankowska Cappigny, née à Varsovie en 1976, débute sa formation dans sa ville natale où elle est diplômée de l’école des Beaux-arts en 2001. Elle obtient une bourse pour poursuivre ses études à l’école supérieure d’art de Paris-Cergy. Cette période est un véritable tournant dans sa formation où plus libre, elle expérimente et découvre la sérigraphie. En 2004 elle est récompensée par un prix à la Biennale de l’Affiche, la même année elle réalise son post-diplôme à l’École nationale supérieure des Arts Décoratifs de Paris.
Avec Anna Ladecka elles créent ensemble leur marque Maïanka qui développe la sérigraphie pour tous à travers des ateliers, mais aussi des affiches, textiles… Ce moment de réunion est un épanouissement de travail pour les deux artistes, et jeunes mères. Au sein de cette alliance sororale toutes deux prennent conjointement confiance en leur travail.

Jaga Jankowska Cappigny décide fin 2018 de s’émanciper de Maïanka pour se consacrer à sa production plastique personnelle. Ses premières œuvres sont une affirmation de son statut d’artiste : elles représentent son corps décomposé par la lumière et les couleurs. Pour chacune de ses créations, elle débute par la photographie qu’elle déconstruit, retouche, découpe, décompose, photocopie jusqu’à laisser apparaitre la trame qui lui servira de modèle pour sa sérigraphie. À cette période elle ajoute peu à peu la peinture à ses œuvres, médium révélateur de son affirmation en tant qu’artiste.

Après l’acceptation de son statut d’artiste elle développe un art de l’intime. Ses œuvres nous chuchotent des histoires de relations intimes, qu’elle soient amoureuses, filiales ou amicales. Ces séries sont souvent entourées d’un halo liquide, Jaga Jankowska Cappigny par ce lien aqueux nous montre qu’il ne s’agit pas ici de présenter des relations fixes mais changeantes, parfois tumultueuses, parfois débutantes, ou même finissantes. Ces images insaisissables filent comme l’eau entre les doigts. Ces relations sont représentées par des scènes presque voyeuses, comme celle d’une femme enfilant (ou enlevant) sa culotte. L’artiste nous dit avec le sourire qu’elle reprend ainsi l’expression « porter la culotte ». Une autre scène déclinée sous différentes sérigraphies, dessins ou peintures est celle d’un personnage nu de dos. La pose évoque celle des nus féminins dans la peintures classique, mais si on décortique la représentation on perçoit entre les couches qu’il s’agit ici d’un corps masculin. Les œuvres de l’artiste sont tout en transparence, opacité, textures, contrastes qui s’empilent sous plusieurs couches de peintures, sérigraphies, dessins, photographies comme un échantillon de la carotte d’une histoire personnelle. Les sérigraphies de Jaga Jankowska Cappigny, bien que constituées d’une certaine profondeur de la matière, conservent une réelle légèreté, parfois accentuée par le support qui n’est ni charpenté ni circonscrit par un châssis mais libre, la toile est alors suspendue et demeure flottante.

Comme un plan large progressif, les sujets des œuvres de Jaga Jankowska Cappigny s’ouvrent peu à peu. D’abord la nature et particulièrement le végétal dont l’éphémère est fixé dans des motifs aux couleurs fluorescentes, cinglantes qui contrastent avec le fond ou inversement. Ces petites parcelles de nature ont été saisies durant la période de confinement si particulière mais fertile pour l’artiste qui a trouvé une fuite à l’enfermement dans cette série.

Actuellement elle travaille sur des zones péri-urbaines en pleine mutation autour de la capitale, en écho à la poétique de la « zone » de l’ancien Paris. Comme à chaque création elle passe d’abord par l’appareil photographique puis la photocopie pour documenter, choisir ses motifs. La photographie est dans l’usage qu’en fait l’artiste un véritable outil qui lui permet de capturer un regard extérieur et d’en extraire un sujet.

Sortant peu à peu de son intimité, trouvant sa légitimité artistique et franchissant sa zone de confort, le travail de Jaga Jankowska Cappigny est dans l’effervescence de sa jeunesse, mais est bel et bien sorti de son adolescence. Dorénavant Jaga Jankowska Cappigny s’autorise à l’art.

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Léa Djurado, critique d'art et commissaire d’exposition

Mai 2021